Le délit de non assistance à personne en danger
Que dit la loi ?
Non assistance à personne en danger :
Le Texte
C’est l’article 223-6 alinéa 2 du Code Pénal qui définit le cadre et les peines de la « non assistance à personne en danger ».
Sera puni des peines de cinq ans d’emprisonnement et de 75.000 Euros d’amende quiconque s’abstient volontairement de porter à une personne en péril l’assistance que, sans risque pour lui ou pour les tiers, il pouvait lui prêter soit par son action personnelle, soit en provoquant un secours.
Explication
Pour qu’il y ait obligation de porter secours, trois conditions préalables doivent être réunies : il faut :
- qu’un péril grave menace une personne ;
- qu’un secours puisse être apporté à cette personne
- que ce secours puisse être porté sans risque
Même si la personne est seulement mourante et même si l’aide paraît vouée à l’échec, elle ne doit pas être refusée : par exemple dans un accident de la circulation
La loi ne distingue pas selon la nature du péril qui peut résulter d’un évènement quelconque : est en péril une personne blessée dans un accident de la circulation, ou la personne à qui a été délivré par erreur un médicament dangereux ou la personne endormie, objet d’attouchements sexuels.
Le danger doit être grave, imminent, constant et nécessitant une intervention immédiate.
Le péril peut provenir de n’importe quelle cause. Et notamment, le péril peut provenir du fait ou de l’imprudence de la victime dont le comportement est à l’origine de son malheur. Le secours reste dû.
Ce n’est pas un secours efficace que veut la loi, c’est un secours car elle ne distingue pas entre les cas où l’assistance est utile et ceux où elle ne l’est pas. Parfois, les prévenus, notamment les médecins plaident que de toutes façons, la victime ne pouvait pas être sauvée. Les juges refusent ce moyen de défense car, à leurs yeux, le délit de défaut de secours est un délit d’attitude. Il est demandé au détenteur des soins de faire quelque chose car il est tenu à une obligation de moyens, pas à une obligation de résultat.
La notion de risque qui exonère quelqu’un de porter secours s’apprécie selon les circonstances tant factuelles que personnelles.
L’intention délictueuse suppose en premier lieu que le prévenu doit avoir eu connaissance du péril menaçant la victime.
Selon la chambre criminelle, il faut que « le prévenu ait eu personnellement conscience du caractère d’imminente gravité du péril auquel se trouvait exposée la personne…et qu’il n’ait pu mettre en doute la nécessité d’intervenir immédiatement en vue de le conjurer. »
C’est ainsi qu’un prévenu a été condamné car, étant à l’origine de l’accident, il s’est arrêté, est descendu de son véhicule, a pris le poul de la victime et, constatant qu’il bat encore, repart sans donner l’alerte pour revenir plus tard alors que les secours alertés par des tiers, étaient sur place.
Le délit n’est pas constitué lorsqu’il est établi que les personnes ne pouvaient avoir conscience d’un péril d’une imminente gravité qu’elles auraient pu écarter par leur intervention immédiate.
Par ailleurs dès qu’il existe un risque sérieux pour celui qui devrait porter assistance, celui-ci est en droit de ne rien faire. Les circonstances doivent aussi être prises en compte.
Par exemple, celui qui ne sait pas nager, ne saurait être condamné pour défaut d’assistance à une personne en train de se noyer.
Mais d’autres fois, le risque est nul. Ainsi sera condamné le médecin qui invoque un banal mal de gorge pour motiver son refus de secourir un malade gravement atteint ou qui se retranche derrière des conditions climatiques mauvaises. De même est fautif le cafetier qui, face à une altercation entre bandes rivales dans son établissement et alors qu’un danger immédiat menaçait la victime, a omis d’appeler la police, le climat tendu régnant sur les lieux ne justifiant pas l’abstention.
Il faut savoir que le risque d’être condamné ne légitime pas l’abstention. Ainsi un chauffeur imprudent cause des blessures à un piéton et s’enfuit, risquant donc une condamnation pour délit de fuite. Les juges n’hésitent pas à le condamner pour refus d’assistance.
L’action personnelle doit être la règle et la faculté de provoquer un secours, l’exception, cette dernière option ne se concevant que lorsqu’il y a péril ou risque grave pour la personne appelée ou lorsque le secours ne peut être efficace que donné par un homme de l’art. Mais dans certains cas, il y aura intérêt à cumuler l’intervention personnelle et l’appel à un tiers.
Le défaut d’assistance n’est punissable que s’il est volontaire. L’intention est en pratique déduite des circonstances.
La complicité ne se conçoit pas mais il n’est pas impossible d’imaginer une coaction dans le cas de plusieurs personnes se trouvant par exemple en face d’un tiers agonisant ou en extrême difficulté et l’abandonnant sans rien faire.
Des décisions de justice admettent que soient simultanément retenus le délit de fuite et celui du défaut de secours.
Pour obtenir réparation, il faut démontrer qu’il existe une relation de cause à effet entre l’indifférence du prévenu et l’aggravation de l’état de la victime. Les tribunaux entendent largement le lien de causalité entre faute et préjudice, surtout en matière d’homicide et blessures involontaires. Les tribunaux déclarent l’action civile recevable. Par exemple, l’action civile de la famille est recevable contre le passager qui n’a pas porté secours à son compagnon qui est décédé.
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